Bac de français 2013, séries S et ES
Corrigé de la question
Quelles sont les caractéristiques des figures maternelles dans les textes du corpus ?
L’action romanesque s’appuie sur des personnages typés. Pour donner l’illusion de la vie, les auteurs s’appuient volontiers sur des êtres qui les ont marqués. La mère ou la grand-mère font partie de cette galerie dans la mesure où les auteurs ont pu vivre avec elles une proximité édificatrice. Les trois textes du corpus appartiennent au XXe siècle. Colette nous propose dans Sido son émerveillement pour sa mère Sidonie. John Steinbeck, dans Les Raisins de la colère, met en scène la forte personnalité de Man, le pivot du clan Joad, tandis que Jean Giono, dans Un Roi sans divertissement, rapporte l’exubérante bienveillance de Mme Tim pour ses petits-enfants.
Ce qui frappe immédiatement dans les trois extraits est l’affectueuse admiration pour ces créations maternelles. Sido est avant tout la gardienne et l’âme de sa petite famille, « inquiète de tout ce qui, privé d’elle, perdait la chaleur et le goût de vivre ». Elle est attentive aux plus faibles, son mari « amaigri », sa fille, la chatte et jusqu’au « géranium » au « rameau […] rompu ». Man joue aussi le « rôle de citadelle de sa famille, de refuge inexpugnable ». Comme Sido, elle est une « guérisseuse ». Mme Tim est pour sa part « abondamment grand-mère », elle est symbolisée par la métaphore de la « cuve » du vendangeur remplie du fruit de sa descendance, image biblique des dons de Dieu dans la profusion de la vie. Ses gâteries, sa joie de vivre lui attachent toutes les affections si bien qu’« on l’aurait toute voulue ». Cette femme âgée a gardé toute la fougue de sa jeunesse, devenant le « Tambour-major » de la bande de ses petits-enfants, commandant de la petite troupe qui l’adore. En revanche le grand âge de Man lui a conféré une aura de sagesse, la mère a choisi la voie du « calme », du « sang-froid » si bien qu’elle est devenue un « arbitre » des différends familiaux. Cette paix qui émane d’elle fait mieux ressortir ses liens secrets avec les sources de la vie. Le personnage féminin effacé s’est transformé en « déesse » tutélaire. À l’opposé la jeune et exubérante Sido devient pour sa fille une magicienne capable par son langage incantatoire de transformer ses courses parisiennes en fabuleuses escapades. Ses mains, comme celles de Man, accomplissent des prodiges. Comme Man, elle accède ainsi à un statut surnaturel proche de la déesse-mère primordiale.
Ces trois extraits présentent donc une image positive de la maternité. Si le mal-aimé Hervé Bazin, dans Vipère au poing, a fait de la mère une « Folcoche » rigide, cruelle et méchante, l’affection d’enfants choyés transforme ici les femmes en consolatrices, protectrices, pourvoyeuses des dons de la Terre avec qui elles vivent en symbiose.