Tu as dit "la maîtresse"... Ce n'est pas une prof ? En quelle classe es-tu donc ?
Que dois-tu faire exactement ?
Tu parles d'analyser le texte.
Mais quelle est la consigne exacte ?
Tu dis que le lien ne te convient pas, mais as-tu cliqué ensuite sur l'un des cinq liens proposés dans le paragraphe "Commentaire composé" ?
Toi qui cherches une méthode d'analyse de texte, cela pourrait pourtant t'aider...
Et il pénétra chez un autre marchand à l’entrée de la rue de la Paix. Dès qu’il eut aperçu le bijou, l’orfèvre s’écria : — Ah ! parbleu ; je le connais bien, ce collier ; il vient de chez moi.
M. Lantin, fort troublé, demanda : — Combien vaut-il ?
— Monsieur, je l’ai vendu vingt-cinq mille. Je suis prêt à le reprendre pour dix-huit mille, quand vous m’aurez indiqué, pour obéir aux prescriptions légales, comment vous en êtes détenteur.
Cette fois, M. Lantin s’assit perclus d’étonnement. Il reprit :
— Mais…, mais, examinez-le bien attentivement, Monsieur, j’avais cru jusqu’ici qu’il était en… en faux.
Le joaillier reprit : — Voulez-vous me dire votre nom, Monsieur ?
— Parfaitement. Je m’appelle Lantin, je suis employé au ministère de l’Intérieur, je demeure 16, rue des Martyrs.
Le marchand ouvrit ses registres, rechercha, et prononça : — Ce collier a été envoyé en effet à l’adresse de Madame Lantin, 16, rue des Martyrs, le 20 juillet 1876.
Et les deux hommes se regardèrent dans les yeux, l’employé éperdu de surprise, l’orfèvre flairant un voleur.
Celui-ci reprit : — Voulez-vous me laisser cet objet pendant vingt-quatre heures seulement, je vais vous en donner un reçu ?
M. Lantin balbutia : — Mais oui, certainement. Et il sortit en pliant le papier qu’il mit dans sa poche.
Puis il traversa la rue, la remonta, s’aperçut qu’il se trompait de route, redescendit aux Tuileries, passa la Seine, reconnut encore son erreur, revint aux Champs-Élysées sans une idée nette dans la tête. Il s’efforçait de raisonner, de comprendre. Sa femme n’avait pu acheter un objet d’une pareille valeur. — Non, certes. – Mais alors, c’était un cadeau ! Un cadeau ! Un cadeau de qui ? Pourquoi ?
Il s’était arrêté et il demeurait debout au milieu de l’avenue. Le doute horrible l’effleura. – Elle ? — Mais alors tous les autres bijoux étaient aussi des cadeaux ! Il lui sembla que la terre remuait ; qu’un arbre, devant lui, s’abattait ; il étendit les bras et s’écroula, privé de sentiment.
Il reprit connaissance dans la boutique d’un pharmacien où les passants l’avaient porté. Il se fit reconduire chez lui, et s’enferma.
Jusqu’à la nuit il pleura éperdument, mordant un mouchoir pour ne pas crier. Puis il se mit au lit accablé de fatigue et de chagrin, et il dormit d’un pesant sommeil.
Un rayon de soleil le réveilla, et il se leva lentement pour aller à son ministère. C’était dur de travailler après de pareilles secousses. Il réfléchit alors qu’il pouvait s’excuser auprès de son chef ; et il lui écrivit. Puis il songea qu’il fallait retourner chez le bijoutier ; et une honte l’empourpra. Il demeura longtemps à réfléchir. Il ne pouvait pourtant pas laisser le collier chez cet homme ; il s’habilla et sortit.
Il faisait beau, le ciel bleu s’étendait sur la ville qui semblait sourire. Des flâneurs allaient devant eux, les mains dans leurs poches.
Lantin se dit, en les regardant passer : « Comme on est heureux quand on a de la fortune ! Avec de l’argent on peut secouer jusqu’aux chagrins, on va où l’on veut, on voyage, on se distrait ! Oh ! si j’étais riche ! »
Il s’aperçut qu’il avait faim, n’ayant pas mangé depuis l’avant-veille. Mais sa poche était vide, et il se ressouvint du collier. Dix-huit mille francs ! Dix-huit mille francs ! c’était une somme, cela !
Il gagna la rue de la Paix et commença à se promener de long en large sur le trottoir, en face de la boutique. Dix-huit mille francs ! Vingt fois il faillit entrer ; mais la honte l’arrêtait toujours.
Il avait faim pourtant, grand’faim, et pas un sou. Il se décida brusquement, traversa la rue en courant pour ne pas se laisser le temps de réfléchir, et il se précipita chez l’orfèvre.