Quelques notions pour le commentaire stylistique
Le discours direct et indirect, le discours indirect libre et le discours narrativisé
Étude de l’ironie dans un texte littéraire et analyse de la description
Les modes de la citation : qui parle ? quel est le point d’énonciation ?
Le discours direct
C’est l’inclusion d’une énonciation (discours citant) dans une autre énonciation (discours cité). Les deux discours (citant / cité) restent autonomes. Chacun des deux systèmes conserve ses embrayeurs (ou déictiques), ses modalités, ses marques temporelles et personnelles. Les déictiques spatiaux (par exemple « à gauche », « à droite », « ici ») situent les objets par rapport à la présence de l’énonciateur. Le discours direct est marqué par son hétérogénéité, son mimétisme. Le tiret indique la prise de parole. La fonction de la proposition incise est d’insérer le discours direct et se caractérise par l’inversion sujet / verbe. Les guillemets ont souvent une fonction démarcative : ils sont la marque du discours cité.
Le discours indirect
Son critère est la subordination du discours cité au discours citant. Il reste alors un seul système énonciatif : le discours citant. Ce type de discours implique la transposition des temps, des personnes et la disparition des déictiques et des modalités de phrase (par exemple, le point d’interrogation). Le discours indirect relève de la paraphrase, de la traduction. On ne peut pas passer dans tous les cas du discours indirect au discours direct.
Le discours indirect libre
C’est la superposition du discours citant et du discours cité ; le discours indirect libre relève de la polyphonie. Il s’agit de parler avec les mots d’un autre et c’est une forme de citation ambiguë par nature. On a des indices de subordination sans subordination grammaticale, et des indices de discours direct. Le discours indirect libre se caractérise par l’absence de verbe déclaratif régissant grammaticalement les paroles mentionnées.
Le discours narrativisé
On l’appelle aussi psycho-récit. Il s’agit du récit de paroles : c’est une paraphrase lointaine, d’un résumé de paroles, d’un sommaire du contenu de l’acte de parole rapporté. Il se distingue du discours indirect par l’absence de subordonnée. Le discours narrativisé sert souvent de transition.
L’ironie, la polyphonie
L’ironie est délicate à analyser. La tradition rhétorique l’analyse au moyen de l’antiphrase, qui est un trope. L’ironie est délicate à manipuler : elle peut ne pas être comprise (cf. le texte de Montesquieu sur l’esclavagisme). On peut noter que l’antiphrase n’est pas toujours présente dans l’ironie. L’approche de l’ironie comme citation, comme phénomène polyphonique est plus intéressante.
Une définition de l’ironie :
Le locuteur présente l’énonciation comme exprimant la position d’un énonciateur dont il se démarque. Souvent, le discours indirect libre est le lieu de l’ironie. Toute ironie peut s’analyser comme un phénomène de mention. L’ironie est une figure : à un signe correspondent deux sens.
La polyphonie peut être appréhendée de cette façon : une voix dit A (qui a souvent une valeur absurde) mais ne le croit pas. Quelqu’un croit à la valeur A : celui-ci est la cible, c’est-à-dire celui qui prend sur lui la valeur de vérité de ce qui vient d’être dit (l’énoncé).
→ Tout discours est polyphonique : derrière une énonciation, il y a plusieurs personnes : l’écrivain, le personnage et celui qui prend sur lui la valeur de vérité de l’énoncé (la cible).
La description
- Elle interrompt la narration et est inséparable d’un risque majeur : elle peut ne pas être lue par le lecteur. La légitimité de la description relève de sa brièveté. La description introduit de l’arbitraire : la narration suppose un ordre et non pas la description. (Valéry)
- Dans un texte romanesque, la description a rarement une valeur documentaire. il s’agit plutôt de donner un cadre au récit. La description est l’art du détour : elle permet d’aborder des questions obscures, difficiles. Elle peut ne pas avoir de limites (cf. Perec).
- Dans le roman du XIXe siècle, la description devient importante (réalisme → peinture du milieu). Elle est toujours un passage virtuose dans la mesure où elle fait apparaître la richesse du lexique. Dans le Nouveau roman, la description se détache de la trame narrative.
- → Comment la description s’intègre-t-elle dans la narration ? Pourquoi intervient-elle à un moment donné ?
- → Qui voit ? De quel point de vue ?
- → Qu’est-ce qui fait d’un texte un texte descriptif ? Quels sont les motifs de la description ?
- → Quelles remarques peut-on faire quant au travail sur le lexique ?
- → Comment la description est-elle construite ? Quel est son sens ? Quelle séduction apporte la description ? Quelle est l’intention de l’écrivain ?
- → La question de la focalisation : toute description se fait à partir d’un certain point de vue.
- → Dans la narration traditionnelle, il y a un mensonge : celui de la fiction (romanesque). On pose ce qu’on lit comme n’appartenant pas au réel : lorsque nous lisons un roman, il existe en fait une intentionnalité initiale : nous posons les choses en tant que fiction.
- → Il existe deux valeurs dans le concept de la description : celle de décrire le réel le plus exactement possible, et sa valeur heuristique : sa capacité de dévoilement, sa capacité à faire apparaître quelque chose, à faire parler le réel. Le narrateur omniscient est un regard qui prétend tout connaître. Il a été une évidence narratologique dans l’histoire du roman.
- Décrire, c’est énumérer. Pour Hamon, l’énumération relève d’un effet de liste.
Fonctions de la description :
- Création d’un effet de réel (par l’hypotypose : figure de style consistant à décrire une scène de manière si frappante, qu’on croit la vivre) : il s’agit de montrer, faire voir, ouvrir un champ de connaissances.
- Ancrage du récit dans un contexte concret ; il y a sentiment de véracité.
- Fonction symbolique : la description permet de dire autre chose, pour remplacer du récit, pour remplacer de l’analyse. Il s’agit d’une fonction analogique : la description devient une métaphore d’autre chose.
- Fonction poétique : la description fait lever chez le lecteur un ensemble de sentiments sur tout ce qui enveloppe le texte. La description compense en quelque sorte la trahison propre à l’écriture. La description sert à dire une synthèse dans la mémoire du romancier. Elle remplace une page analytique. Elle transmet un vécu dans sa totalité. Dans la description, en effet, l’écrivain se bat pour repousser les limites du dicible. L’écriture de la description est très proche de l’écriture poétique. En somme, la description peut avoir plusieurs fonctions : une fonction symbolique, iconique (ressemblance stricte), indicielle (métonymique).
Lire la description :
- Lire le littéral dans la description (lexique, figures, style, etc.)
- Y a-t-il un ordre dans la description ? Le regard va-t-il du haut vers le bas ? Du plus apparent au moins apparent ?
- Fonction de la description : est-on face d’un style simple, moyen, sublime ? Qu’est-ce qui est décrit ? Des objets de la vie courante ? Des choses de la vie intellectuelle ? S’agit-il de choses de l’ordre de la nature ou de la construction humaine ?